Le catafalque aux miroirs
Dans la peau qui s'y frotte, le Catafalque introduit mille échardes.
Aux poèmes d'Alice Massénat, à leur violence offerte par la douleur
prodigue, je m'écorche avec plaisir. Ce cri, beau comme les branches
noires du marronnier, chauve si vite cet automne, ou comme la terrible
clameur matinale des pies furieuses au coeur du noyer, est le souffle
précieux qu'on voudrait recueillir, parce que ultime, exténué de sa
propre vigueur, mais qui en vérité se prolongerait sans fin. Parfois se
loge un ver dans la pomme, un vers d'Alice dans la tête, sa lecture
s'enroule sur elle-même, fixant l'image dont on se gorge.
incapable de n'être que mon propre amour du bouleversant
me surprend huit ans en arrière devant l'écartèlement des tulipes,
retournées au maximum de leur beauté quand elles vont perdre leurs
pétales, juste avant de disparaître du monde.
le vitupérateur de brume, l'orgueil des seins
surgit du brouillard, lugubre bateau, loin derrière une sirène à peine
esquissée, sous l'eau marine sombre du premier plan, les reins cambrés
en une posture de «la Mort du cygne» qui m'émouvait petite - tellement
à vif d'enfance !
S'immerger dans ces poèmes, c'est aussi rencontrer le trou sans eau
qui roule dans l'onde et qu'en véritable «trobador» le poète a débusqué.
Dominique Paul
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